Christophe, aimer ce qu'il est

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Photo @David Molitor


C'est une icône de la chanson française.

Un artiste complexe au parcours atypique dont le talent rassemble un public d'inconditionnels, jeunes et fans de la première heure. Christophe était en tournée dans le Var les 29 et 30 janvier pour présenter "Aimer ce que nous sommes", son dernier album. Plusieurs chansons ont été écrites avec une Varoise, Marie-Pierre Chevalier.



Aimer ce que nous sommes est votre 9e album. D'où vient le titre ?



Ce n'est pas une idée de moi. Le titre vient d'une chanson de l'album, Mal comme écrite par Daniel Bélanger, un artiste canadien pour lequel j'ai beaucoup d'admiration. Il a écrit les paroles en deux jours, dans l'urgence, à partir d'un de mes textes, Welcome, qui ne me convenait pas. La chanson s'appelait au départ Aimer ce que nous sommes. C'est une chanson magique dans laquelle je me suis tout de suite retrouvé et dans laquelle tout le monde peut se retrouver. Elle a un climat particulier qui a inspiré le titre de l'album.



Comment décririez-vous cet album ?



C'est un album plein de climats différents. Un peu comme des petits courts métrages, certains en noir et blanc d'autres en technicolor.



Cet éclectisme, les sons électro de cet album plaisent beaucoup au jeunes qui viennent nombreux à vos concerts. C'est important de renouveler son public ?



Plus qu'important. C'est quelque chose qui donne la même envie que quand on a 20 ou 30 ans. On n'est pas dans le passé avec quelqu'un qui vous aime pour ce que vous avez été ou par rapport à sa génération. Avec des jeunes on est dans l'évolution, dans la créativité. Ils vous parlent de la musique d'une façon très pointue : ils ont une manière, un feeling pour l'écouter. Avec eux je ne me sens pas recroquevillé sur un truc ancien, ni décalé. Je vis l'instant présent.



La tournée a démarré au printemps dernier. Le spectacle est bien rodé…



Rodé n'est pas un mot que j'utilise. Je ne sais pas ce que ça veut dire rodé. Chaque soir est une nouvelle aventure. Je viens comme je suis. Je ne suis pas du tout une bête de scène. Je suis quelqu'un qui est, comment dire… comme en suspension sur des vagues de son. Je fais du son avec mes mots. Je suis toujours sur le fil du rasoir. Dans le rodage il n'y a pas de place pour l'émotion.



Quel rapport entretenez-vous avec la scène ?



Un rapport tout à fait naturel. Les tournées, je les vis comme un voyage. Je prends beaucoup de plaisir à être dans des villes et des théâtres différents tous les soirs. C'est comme quelqu'un qui part en vacances. Les lieux sont importants. Ils nourrissent la création. Je n'ai pas toujours le temps de visiter les villes. En général j'arrive de nuit, vers 3 heures du matin. L'après-midi, je me lève pour répéter. Mais je vois une facette de la ville que tout le monde ne voit pas.



Qu'est-ce qui vous plaît la nuit ?



La nuit on n'a plus de bruit. On se retrouve vraiment quand la ville dort. En réalité, la ville revit. J'adore particulièrement quand la nuit est monte. Je suis quelqu'un qui aime beaucoup le ciel.



Fin janvier, vous serez à Hyères et Sanary pour deux concerts dans le Var où vous n'avez pas joué depuis longtemps. Vous êtes très attendu… Chaque soir est une rencontre avec le public. C'est toujours plein de surprises. J'aime amener les gens dans mon film. Le spectacle est en deux parties comme une pièce de théâtre : Aimer ce que nous sommes en 1ere partie, et des chansons plutôt populaires comme Les marionnettes ou Les mots bleus en 2eme partie.. On n'est pas nombreux sur scène, cinq. Ça laisse de l'espace.



Vous avez écrit plusieurs de vos chansons avec une Varoise. Vous connaissez bien le Var ?



J'ai beaucoup traîné dans une auberge entre Flassans et Le Luc : une bastide magnifique avec une très belle piscine où la nuit on voit des sangliers dans les arbres. Je connais bien la côte aussi, Salernes et je suis souvent venu dans le haut Var. J'adore ces coins qui sentent bons la pierre chaude et les champs de lavande. Ça ressource la tête.



Vous avez mis sept ans avant de sortir Aimer ce que nous sommes. C'est important de prendre le temps pour travailler ? Je ne prends beaucoup de temps pour travailler. Je suis tout le temps en création dans mon quotidien. Je ne décide pas de faire un album. L'album se fait au cours du temps. On dit il a mis 7 ans. En fait non. C'est 7 ans de vie.



Où en est le prochain album ?



L'album prend forme mais il y a beaucoup de travail. En ce moment, je cherche une étoffe pour l'album. Il faut connaître la couleur de votre film, avoir une idée mme abstraite. Comme la mode ce n'est jamais pareil. Je cherche un habit qui soit celui de l'air du temps. Je le fais avec une analyse spontanée et les émotions que je ressens. Le plus dur c'est faire une synthèse de tout ça. Ça peut prendre du temps. Ça dépend de quoi on est nourrit, sur quoi on rebondit. C'est pour ça que j'aime les concerts, pour voir les différentes générations, rencontrer les gens, écouter leurs réactions. Les gens me donnent souvent une direction. J'écoute, je prends. Je rebondis sur ce qu'on me dit.



Comment travaillez-vous ?



J'aime bien mon univers chez moi, à Paris, pour créer parce que j'ai tous mes vieux synthé, mes vieilles machines. Je fais toujours la musique avant. Je n'ai jamais essayé d'écrire d'abord un texte et de faire la musique dessus. Il y a des choses que je jette d'autre que je garde. Pourquoi je ne sais pas en fait. Après, pour la partie technique, les lieux sont important par ce qu'ils permettent aussi des rencontres. Cette fois-ci, j'aurais peut-être l'envie de mixer et de faire les finitions moi-même. C'est intéressant. Mais c'est intéressant aussi de travailler avec un ingénieur du son. L'autre vous propose des couleurs qui déclenche du plaisir. Il vous permet d'avoir la distance par rapport à votre œuvre. On peut voir des failles et les corriger.



Qu'est ce qui vous inspire ?



J'aime bien la nouveauté. Je suis accroc à l'inconnu. J'ai toujours envie de me surprendre moi-même. Quand on est artiste, c'est comme si on était deux. On a vraiment une vision de l'autre. C'est pour ça que c'est plus difficile pour nous d'être formaté dans le quotidien ou dans la vie normale. Est-ce que c'est une soustraction, une addition ? Je ne sais pas. C'est difficile à calculer. Mais la passion est là. La petite flamme brûle encore.