Christophe fait son Royal Circus

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Photo David Molitor.

Final grandiose des Nuits Botanique 2009 au Cirque royal samedi à Bruxelles. Christophe y a proposé son univers fantasmé d'art, de musique, cinéma, danse.

Un final de festival en apothéose, c’est bien, non ? Voilà ce qu’a offert, aux Nuits Botanique, le chanteur Daniel Bevilacqua, plus connu sous le prénom Christophe. "Je suis venu vous raconter mon histoire" dit l’homme, visiblement bien dans ce qu’il appelle le "Royal Circus". C’est exactement ce qui se passe, trois heures durant, dans un spectacle total et absolu. Le plan a été clairement prédéfini : une première partie avec l’album le plus récent, "Aimer ce que nous sommes" (2008) et une seconde alignant les tubes, pour faire plaisir à tout le monde.


Aimer ce que nous sommes" est une œuvre complexe, à la texture sonore et poétique multicouches. Le traduire sur scène impliquait des "concessions", mais Christophe s’est donné les moyens de ces réarrangements. Déjà coresponsable de la réalisation de l’album, le guitariste Christophe Van Huffel a remis l’ouvrage sur le métier, avec de fabuleux musiciens comme Pascal Charpentier au piano, Erik Truffaz à la trompette, Jean-Paul Dessy au violoncelle et à la tête de son Mons Orchestra, Diabolo l’harmoniciste euh, diabolique

C’est à Helena Noguerra, sublime dans sa robe portefeuille mastic, que revient l’honneur d’ouvrir théâtralement le bal. Deux thunes dans le jukebox, de très vieux rock’n’roll ouvrent grand la boîte à fantasmes. La musique en fait partie, avec ses basculements de l’acoustique à l’electro, ses zébrures de guitare affolée. Et advint Odore di femina". Guitares et voix flamencas, volutes de trompette, cris de guitare, tension electro, échantillonnage de "2001 Odyssée de l’espace" : on pourrait croire le choc trop violent mais non, l’audace dans le mélange des couleurs paie. Constellée de décalages harmoniques, de brisures mélodiques, la musique de Christophe ouvre ces portes de la nuit (qui) ne sont jamais fermées" (Tonight Tonight").

Jusque-là incrustée dans la matière sonore, la voix est relativement en retrait. Dans la seconde partie, elle revient à l’avant-plan. L’on croyait connaître "J’t’aime à l’envers", Le beau bizarre", "Minuit boulevard" Succès , mais on n’y connaissait rien. Toujours avec Christophe Van Huffel aux arrangements, ces mélodies d’un autre âge sont recréées. Diamants, elles avaient plusieurs facettes ! "La petite fille du troisième" est transfigurée electro-blues, quand Daisy" tourne franchement electro et que "Le tourne-cœur" balance entre piano et synthés. "Señorita" est tellement heureuse d’avoir retrouvé ses racines latines, guitares et mains qui claquent, qu’elle revient : "Allez, on la rechante, parce que ce n’est pas tous les jours qu’on le voit."


Le solo de Truffaz (Les paradis perdus), les cordes montoises (Le dernier des Bevilacqua), l’imposant Charpentier devant son Steinway (Les mots bleus), ce n’est plus un concert mais un festival emporté par la chorégraphie de Marie-Claude Pietragalla, la danse de Cynthia Phung-Ngoc, la scénographie d’Andrée Putman. Le temps suspend son vol pour n’être qu’instant magique. Onirique à souhait, le film de Christophe se termine, comme le disque, sur le générique. Certes, un tel univers, ça coûte cher. Aux organisateurs des Nuits, la mise en place de ce spectacle a aussi valu quelques sueurs froides, mais le jeu en valait diantrement la chandelle.

C’est bien de le dire, non ?