Christophe 114 Chansons

[david]

Son dernier album s’appelle Aimer ce que nous sommes. Mais on peut aussi aimer ce qu’il a été : intégrale des années 60 à 80, sur un plantureux coffret.

Christophe
114 Chansons

Daniel Bevilacqua, dit « Christophe », sur tous les fronts : en amont, les chansons délétères de cette période où l’homme aux Lamborghinis fracassées composait avec Jean-Jacques Debout (Excusez-moi monsieur le professeur), et chantait les mélodies de Jacques Denjean (comme le faisaient Sylvie Vartan ou François Deguelt, en cette époque de variétés obligatoires d’une chaîne de télévision unique). En aval, quelques merveilles enfouies, comme un extrait de la bande originale de La route de Salina, tentative de cinéma d’auteur d’un Georges Lautner perdu dans la nuit américaine, et autres chansons perdues (pas pour tout le monde, car qui ne s’est pas enivré de Petite fille du soleil ?). Au centre de la cible, deux chefs d’œuvre absolus (Les mots bleus et Les paradis perdus, en regrets éternels que le parolier Jean-Michel Jarre ait un jour acheté un synthétiseur), une extravagance publique (Olympia), l’obstination enfantine de Samourai (ou Christophe sur le toit du monde), et des clichés où le chanteur pose comme le Gérard Blanc de Martin Circus (Pas vu pas pris), ou pousse le bouchon un peu loin dans le karaoké plaisantin (Clichés d’amour). Il y a même une baleine blanche, ce Le beau bizarre où, dès 1978, Christophe commençait à ne plus chanter sur des musiques somptueuses, mais mettait déjà en scène sa vie comme des clichés polychromes, proclamant Il faut oser le faire, en petit marquis poudré à l’ère du punk. Et osant un définitif Je voudrais tellement vous plaire/Mais je ne sais pas comment faire. Donc, l’inventaire précise : huit albums originaux en fac-similé, trois volets collectors, neuf singles pour le juke-box, et la confirmation que les chipoteurs ne sont pas les bienvenus ici. Il faut prendre le maniérisme, la ligne mince entre variété et variétoche, les poses et les déchirements glacés. Il faut tout prendre : c’est tellement bon de ne pas être raisonnable, parfois.