Christophe, voyage sublime sur le vertige d'un songe

[david]

Photo © ˙·٠•●★ Black Night David Molitor


Attiré par les sirènes de l'inconnu, Christophe est bel et bien armé pour succomber à leurs appels. Il nous plonge immédiatement dans les méandres de son dernier opus (Aimer ce que nous sommes) où le beau bizarre se mélange au bazar surprenant.

Ses chansons aux contours vertigineux (Parle lui de moi, Mal comme, Magda...), il les fait détonner à sa manière c'est-à-dire à la fois grandioses, futuristes, barrées, expérimentales et touchantes. Parfait pour raviver les désirs. Christophe coud et découd la matière sonore, explore un état aux limites de la conscience. Chacun des rythmes semble correspondre à une humeur. Cela relève parfois du dogme. Mais le frisson et l'étourdissement des sens sont là comme sur Tandis que, morceau d'une beauté effarante.
Christophe crée ainsi une fracture irréductible avec tout ce qu'il a pu produire au cours de la période yé-yé. Sa musique est désormais un appel à la sensation. Entre boucle hypnotique, transe hallucinatoire et polaroïd cinématographique.
Il y a aussi cette voix qui a le beau rôle, tour à tour androgyne et solennelle, voltigeuse et insaisissable, capable d'envolées harmonieuses comme de caresses troublantes. Même les vieilleries (Les marionnettes, Succès fou, Senorita), réarrangées et servies en deuxième partie, nous prennent par la main. Quant aux Paradis perdus et aux Mots bleus, ils ne cessent pas d'être un bonheur sans nom.

Ce concert est la déclaration d'indépendance d'un artiste à l'aura unique qui, jusque dans les plus intimes replis de son âme, aspire plus que jamais à jouir librement de lui-même. L'aventure est une drogue invitant à aller toujours plus loin.
PATRICE DEMAILLY