Christophe, le cueilleur d’instants
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Christophe, le cueilleur d’instants
Christophe, dont les chansons traversent allégrement les décennies (Aline, Les mots bleus, Les Paradis perdus, etc) est aussi passionné de cinéma. Invité au Festival de cinéma de Brive – Rencontres du moyen métrage - pour une carte blanche, il a présenté cinq films.
Ce jour-là, assis à l’une des petites tables de fer forgé installées devant le cinéma Le Rex, Christophe parle. Christophe capte le temps. Christophe cueille l’instant.
Chanteur, musicien, mais aussi photographe, cinéphile ou encore créateur de mode, l’homme artiste chemine dans les images des mots. Une vie entière à voguer dans les terres de l’Inconnu où il engrange des sons, des couleurs, des lumières. Des instantanés de vie qu’il rassemble et transmute avec une générosité naturelle. Rencontre avec l’artiste..
« Je suis toujours en décalage. Par exemple, Mort à Venise, je l’ai vu 5 ans après sa sortie. Je prends toujours le temps… je laisse à l’image le temps d’arriver, de rentrer en moi-même, dans mon univers partagé de musiques, de couleurs. Ensuite, chaque chanson est un plan, comme un film court. Je ne me considère pas comme un chanteur mais je pose un plan nourri d’images, de sons, de mode. Une musique, ce sont des images et je dis parfois mon dernier album, ce n’est pas mon album, c’est mon dernier film. »
Christophe ressemble à ces palettes de peintre couvertes de multiples couleurs et prêtes à enrichir une éternelle fresque : « Je découvre l’instant. Vous savez, je compose avec des immeubles en face de chez moi. Je suis “Fenêtre sur cour”, en plein dans le cinéma. Je vois le regard des autres, je regarde les lumières… Il y a les lumières qui restent allumées toute la nuit et celles qui s’éteignent… ».
A l’image d’un jeu de taquin, les pièces de la conversation s’entremêlent, glissent de scènes en scènes, s’imbriquent et se retirent ou s’ajustent comme un puzzle en perpétuel mouvement vers la création :
« Au cinéma, j’ai toujours été attiré par les films où il y avait des filles, je ne regardais pas les westerns hormis quand il y avait des indiennes… J’ai moi-même beaucoup filmé dans ma vie, je garde tous les rushes depuis que j’ai 16 ans. Et j’ai toujours fait de la photo… Il faut du temps, laisser le temps au plan…. J’ai crée quelques musiques de films, j’aurais bien aimé ne faire que ça mais la vie passe… ».
Christophe s’arrête, regarde le projectionniste qui vient de sortir du cinéma, trouve cette profession magnifique et reprend la palette des émotions : « L’hôtel c’est la fuite. Je vais dormir à l’hôtel quand j’en ai marre d’être chez moi. L’image de l’hôtel, c’est aussi les hôtels de passe, la rue Saint-Denis où, plus jeune, j’aimais me promener, ce sont des univers, des couleurs, des sons… La création vient d’ailleurs… Je n’ai jamais été carriériste, je vis l’instant, avec des hauts, des bas… Je crée dans tous les domaines et la mode me tente, d’ailleurs j’ai failli être dans la mode. Je vais peut-être y revenir… Pour tout, parler d’amour, c’est l’essence
LE CINEMA DE CHRISTOPHE
Pour sa carte blanche au Festival de cinéma de Brive – Rencontres du moyen métrage – Christophe a choisi cinq films d’époque et d’univers différents mais tous construits autour d’un personnage féminin fort : Lola Montès de Max Ophuls (1955), Une femme à sacrifier de Masaru Konuma (1974), Wanda de Barbara Loden(1970), L’inconnu de Tod Browning(1927) et un court métrage de Stéphane Derdérian, Plus loin encore (2008). Car Christophe, dont les chansons traversent allègrement les décennies (Aline, Les mots bleus, Les Paradis perdus, etc) est aussi passionné de cinéma.
« Tous les films que j’ai choisis étaient des films que j’avais envie de revoir, explique Christophe. Je les aime tous. J’en ai revu certains en DVD mais la projection, c’est une autre histoire ! » Depuis la scène, il salue alors le projectionniste haut perché dans sa cabine car l’envers du décor des salles de cinéma, Christophe en connaît les moindres détails.
« Plus jeune, je projetais des films en 9,5 mm, puis en 8mm, en 16 mm jusqu’à l’envie, un jour, d’installer un projecteur 35 mm dans mon appartement. Je n’ai pas cherché à savoir ce que cela signifiait mais j’ai collectionné des films pendant 10 ans… une véritable passion puisque pendant toutes ces années, j’ai arrêté de chanter ».
« Le problème, c’est que les copies sortaient en version française, alors, grâce à un circuit parallèle, je me suis lancé dans une belle collection en version originale sous-titrée. Normalement, ces films-là doivent être détruits à cause de l’usure, des rayures mais…. j’avais trouvé un filon ».
De cette fièvre de la pellicule, il garde le souvenir heureux de rencontres, de nuits à chiner, de trouvailles, mais aussi de la « mécanique » : « La sensualité de la pellicule, c’est d’abord l’odeur. Vous ouvrez la boîte et vous en prenez plein la gueule. Ca me rend bien, c’est une bonne vibration et ça donne envie de chercher d’autres films ».
Ces 10 années, ce sont aussi des moments magiques comme le jour où Patrick Dewaere et Patrick Bouchitey débarquent chez lui et se retrouvent finalement devant un Christophe projectionniste qui leur passe, sur son écran de 5,50 m, le film qu’ils venaient de terminer et qu’ils n’avaient pas encore vu. Ou encore le maître Fellini qui contacte un jour Christophe pour lui demander sa copie de La Strada en VO sous-titrée car Henri Langlois ne l’a pas à la Cinémathèque…
Une folle épopée à la recherche du film désiré, de l’obscur objet de désir, qui se termine par une perquisition de la police, confisquant sans état d’âme, ces films normalement destinés au pilon. Une rupture.
FILMS POUR CARTE BLANCHE
« J’ai accepté de venir à ce Festival pour moi, dit Christophe en souriant. J’aime découvrir ces jeunes réalisateurs, c’est un bon festival avec une équipe qui a du goût et qui connaît le cinéma. J’étais content de cette carte blanche et je partage avec le public le plaisir de voir des films ».
« De Lola Montès, le film de Max Ophuls, je garde l’émotion d’un univers de romantisme et de couleurs ; Une femme à sacrifier, je l’ai redécouvert il y a un mois lors de sa sortie en DVD. Je me suis beaucoup mis au cinéma asiatique ; dans les films coréens, chinois, japonais, les gens qui font la musique vont en général assez loin et dans un film, j’aime une belle musique sinon il n’en faut pas. Par exemple dans le court métrage de Sébastien Derdérian, Plus loin encore, la musique est une belle robe du film. Mais Sébastien laisse aussi le temps aux plans.
Pour Wanda, c’est le souvenir de Barbara Loden dans La Fièvre dans le sang d’Elia Kazan où elle est la belle-sœur de Warren Beatty. Avec ce film qu’elle réalise plus tard, je retrouve une ambiance, il se passe quelque chose, un univers ».
Avant la projection du film de Masaru Konuma (Une femme à sacrifier), Christophe ajoutera :
« Dans le choix de ce film, il est aussi question de l’actrice, Naomi Tani… désirable ! Oui, tous les films que j’ai choisis tournent autour de figures féminines fortes, c’est mon “t’aime !”.»
Ce jour-là, assis à l’une des petites tables de fer forgé installées devant le cinéma Le Rex, Christophe parle. Christophe capte le temps. Christophe cueille l’instant.
Chanteur, musicien, mais aussi photographe, cinéphile ou encore créateur de mode, l’homme artiste chemine dans les images des mots. Une vie entière à voguer dans les terres de l’Inconnu où il engrange des sons, des couleurs, des lumières. Des instantanés de vie qu’il rassemble et transmute avec une générosité naturelle. Rencontre avec l’artiste..
« Je suis toujours en décalage. Par exemple, Mort à Venise, je l’ai vu 5 ans après sa sortie. Je prends toujours le temps… je laisse à l’image le temps d’arriver, de rentrer en moi-même, dans mon univers partagé de musiques, de couleurs. Ensuite, chaque chanson est un plan, comme un film court. Je ne me considère pas comme un chanteur mais je pose un plan nourri d’images, de sons, de mode. Une musique, ce sont des images et je dis parfois mon dernier album, ce n’est pas mon album, c’est mon dernier film. »
Christophe ressemble à ces palettes de peintre couvertes de multiples couleurs et prêtes à enrichir une éternelle fresque : « Je découvre l’instant. Vous savez, je compose avec des immeubles en face de chez moi. Je suis “Fenêtre sur cour”, en plein dans le cinéma. Je vois le regard des autres, je regarde les lumières… Il y a les lumières qui restent allumées toute la nuit et celles qui s’éteignent… ».
A l’image d’un jeu de taquin, les pièces de la conversation s’entremêlent, glissent de scènes en scènes, s’imbriquent et se retirent ou s’ajustent comme un puzzle en perpétuel mouvement vers la création :
« Au cinéma, j’ai toujours été attiré par les films où il y avait des filles, je ne regardais pas les westerns hormis quand il y avait des indiennes… J’ai moi-même beaucoup filmé dans ma vie, je garde tous les rushes depuis que j’ai 16 ans. Et j’ai toujours fait de la photo… Il faut du temps, laisser le temps au plan…. J’ai crée quelques musiques de films, j’aurais bien aimé ne faire que ça mais la vie passe… ».
Christophe s’arrête, regarde le projectionniste qui vient de sortir du cinéma, trouve cette profession magnifique et reprend la palette des émotions : « L’hôtel c’est la fuite. Je vais dormir à l’hôtel quand j’en ai marre d’être chez moi. L’image de l’hôtel, c’est aussi les hôtels de passe, la rue Saint-Denis où, plus jeune, j’aimais me promener, ce sont des univers, des couleurs, des sons… La création vient d’ailleurs… Je n’ai jamais été carriériste, je vis l’instant, avec des hauts, des bas… Je crée dans tous les domaines et la mode me tente, d’ailleurs j’ai failli être dans la mode. Je vais peut-être y revenir… Pour tout, parler d’amour, c’est l’essence
LE CINEMA DE CHRISTOPHE
Pour sa carte blanche au Festival de cinéma de Brive – Rencontres du moyen métrage – Christophe a choisi cinq films d’époque et d’univers différents mais tous construits autour d’un personnage féminin fort : Lola Montès de Max Ophuls (1955), Une femme à sacrifier de Masaru Konuma (1974), Wanda de Barbara Loden(1970), L’inconnu de Tod Browning(1927) et un court métrage de Stéphane Derdérian, Plus loin encore (2008). Car Christophe, dont les chansons traversent allègrement les décennies (Aline, Les mots bleus, Les Paradis perdus, etc) est aussi passionné de cinéma.
« Tous les films que j’ai choisis étaient des films que j’avais envie de revoir, explique Christophe. Je les aime tous. J’en ai revu certains en DVD mais la projection, c’est une autre histoire ! » Depuis la scène, il salue alors le projectionniste haut perché dans sa cabine car l’envers du décor des salles de cinéma, Christophe en connaît les moindres détails.
« Plus jeune, je projetais des films en 9,5 mm, puis en 8mm, en 16 mm jusqu’à l’envie, un jour, d’installer un projecteur 35 mm dans mon appartement. Je n’ai pas cherché à savoir ce que cela signifiait mais j’ai collectionné des films pendant 10 ans… une véritable passion puisque pendant toutes ces années, j’ai arrêté de chanter ».
« Le problème, c’est que les copies sortaient en version française, alors, grâce à un circuit parallèle, je me suis lancé dans une belle collection en version originale sous-titrée. Normalement, ces films-là doivent être détruits à cause de l’usure, des rayures mais…. j’avais trouvé un filon ».
De cette fièvre de la pellicule, il garde le souvenir heureux de rencontres, de nuits à chiner, de trouvailles, mais aussi de la « mécanique » : « La sensualité de la pellicule, c’est d’abord l’odeur. Vous ouvrez la boîte et vous en prenez plein la gueule. Ca me rend bien, c’est une bonne vibration et ça donne envie de chercher d’autres films ».
Ces 10 années, ce sont aussi des moments magiques comme le jour où Patrick Dewaere et Patrick Bouchitey débarquent chez lui et se retrouvent finalement devant un Christophe projectionniste qui leur passe, sur son écran de 5,50 m, le film qu’ils venaient de terminer et qu’ils n’avaient pas encore vu. Ou encore le maître Fellini qui contacte un jour Christophe pour lui demander sa copie de La Strada en VO sous-titrée car Henri Langlois ne l’a pas à la Cinémathèque…
Une folle épopée à la recherche du film désiré, de l’obscur objet de désir, qui se termine par une perquisition de la police, confisquant sans état d’âme, ces films normalement destinés au pilon. Une rupture.
FILMS POUR CARTE BLANCHE
« J’ai accepté de venir à ce Festival pour moi, dit Christophe en souriant. J’aime découvrir ces jeunes réalisateurs, c’est un bon festival avec une équipe qui a du goût et qui connaît le cinéma. J’étais content de cette carte blanche et je partage avec le public le plaisir de voir des films ».
« De Lola Montès, le film de Max Ophuls, je garde l’émotion d’un univers de romantisme et de couleurs ; Une femme à sacrifier, je l’ai redécouvert il y a un mois lors de sa sortie en DVD. Je me suis beaucoup mis au cinéma asiatique ; dans les films coréens, chinois, japonais, les gens qui font la musique vont en général assez loin et dans un film, j’aime une belle musique sinon il n’en faut pas. Par exemple dans le court métrage de Sébastien Derdérian, Plus loin encore, la musique est une belle robe du film. Mais Sébastien laisse aussi le temps aux plans.
Pour Wanda, c’est le souvenir de Barbara Loden dans La Fièvre dans le sang d’Elia Kazan où elle est la belle-sœur de Warren Beatty. Avec ce film qu’elle réalise plus tard, je retrouve une ambiance, il se passe quelque chose, un univers ».
Avant la projection du film de Masaru Konuma (Une femme à sacrifier), Christophe ajoutera :
« Dans le choix de ce film, il est aussi question de l’actrice, Naomi Tani… désirable ! Oui, tous les films que j’ai choisis tournent autour de figures féminines fortes, c’est mon “t’aime !”.»
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